Armel Tripon : « il y a comme un mini pot-au-noir devant, une zone de transition pas évidente »
Le skipper de L’Occitane en Provence navigue ce lundi 11 janvier en 11e position du Vendée Globe. Armel Tripon a repris beaucoup de milles ce week-end aux dix bateaux devant lui. Son prochain objectif : trouver le bon chemin dans un labyrinthe de zones sans vent qui ressemble à un mini pot-au-noir avant l’heure. Et si possible aussi sans trop se rationner sur la nourriture…
Début du 65e jour de mer sur le Vendée Globe et Armel Tripon a une obsession en tête : terminer ce tour du monde en solitaire auquel il participe pour la première fois en assurant le meilleur des classements. On a bien vu avec l’abandon d’Isabelle Joschke que rien n’est gagné d’avance sur cette épreuve « Isabelle m’a impressionné dans sa capacité à résister au mal sur toute cette course ! Elle est allée chercher loin ! Elle avait fait le plus dur, je suis déçu pour elle ! », explique Armel. Naviguer de nouveau en Atlantique est un soulagement évident par rapport aux tempêtes du Pacifique, mais cela n’en demeure pas moins une entreprise périlleuse. Dont la réussite dépend beaucoup du savant dosage à réajuster sans cesse entre prise de risque et performance.
Conditions complexes pour remonter l’Atlantique
Ce lundi 11 janvier au pointage du matin, Armel Tripon est un peu moins véloce que ce week-end (il était le plus rapide de la flotte hier dimanche). Pour les 14 bateaux qui mènent le Vendée Globe, trio de tête inclus, les conditions sont très compliquées dans cette remontée de l’Atlantique sud. Car des cellules anticycloniques sans vent jalonnent le parcours et se glisser entre elles est un casse-tête au résultat aléatoire. Le fait que le leader Yannick Bestaven ait perdu les trois quarts de son avance en quatre jours le montre bien.
« Il fait grand beau, j’ai ouvert la véranda, je suis heureux en mer »
A bord de L’Occitane en Provence, Armel Tripon navigue, lui, en bordure d’une zone de vents faibles, qui se déplace sur sa droite, dans son nord-est. Cette bordure est parfois très favorable – comme ce week-end quand il filait à 20 nœuds de moyenne – et parfois un peu moins. « Tout va bien à bord » assure Armel, joint au téléphone ce matin, « il fait grand beau, 18 degrés, c’est très agréable. C’est sympa de retrouver les latitudes moins hostiles, de pouvoir naviguer aéré. J’ai ouvert la « véranda » (les bâches transparentes qui fermaient le cockpit dans le grand sud), l’air circule dans le bateau, ça fait un bien fou. Je fais tout sécher. Je suis heureux en mer. Cette nuit c’était magnifique : j’ai eu droit à un énorme ciel étoilé, splendide… »
Les conditions de vent et de mer ? « Je suis en bordure d’anticyclone, j’ai un vent pas très stable entre 12 et 14 nœuds. Je suis au près, ça tape un peu… mais il n’y a évidemment aucune comparaison avec le Pacifique ! L’anticyclone avec lequel je joue se décale dans l’est, donc ça devrait aller pour moi. Ce qui est compliqué c’est plus tard, d’ici deux à trois jours : quand je vais me retrouver à l’endroit où est en ce moment Yannick Bestaven, il y aura une zone sans vent et une nouvelle transition pas évidente du tout à négocier ».
Pour l’heure, L’Occitane en Provence a réussi à revenir à environ 300 milles du 10e (Maxime Sorel) et à 800 milles du leader. Une position qu’Armel est allé chercher, quand on songe que voilà 60 jours, il était 32e du Vendée Globe et qu’il a compté jusqu’à 2200 milles de retard suite à son avarie de hook en tout début de course.
Arrivée début février ? « Je suis un peu court en vivres… juste un petit peu »
« Je regarde les classements bien sûr, mais je ne me préoccupe pas trop des écarts » assure Armel, « J’ai profité des conditions plus stables pour faire un check complet du bateau et il est nickel. J’ai félicité le bateau, il le mérite ! » Côté classements, il faut s’attendre à des coups d’accordéon : « l’élastique va se détendre dans l’autre sens pendant trois jours : je vais probablement reperdre un peu de terrain, mais ce qui compte c’est de passer la prochaine transition en fin de semaine. Je rappelle que la route est encore très longue (plus de 5600 milles) et qu’on ne sera probablement pas aux Sables-d’Olonne avant début février. »
Cela voudrait dire peut-être 85, voire 90 jours de mer. D’où l’idée de commencer à penser aux réserves de vivres restant à bord. « Je pense que je suis un petit peu court de ce côté-là, mais je ne suis pas inquiet : j’ai pris 85 jours de nourriture et s’il faut finir un peu sec je saurai faire. Je sais que d’autres skippers ont pris beaucoup moins » explique Armel Tripon. « S’il faut me rationner, j’y penserai quand il fera vraiment chaud et que j’aurai donc moins de besoins en apport énergétique. Dans le grand sud, il n’était pas question de se rationner : j’avais besoin de calories pour tenir le coup. Au pire, j’ai une ligne de pêche à bord mais pour pêcher il faut être très, très lent… et je ne vais tout de même pas ralentir le bateau juste pour taquiner le maquereau !»
« Un peu comme un mini pot-au-noir devant »
L’équation importante du moment est plutôt de trouver la bonne idée pour négocier la transition entre le vent de nord-ouest et le vent de nord-est. « C’est un peu comme un mini pot-au-noir avant l’heure cette zone où se trouve Yannick (Bestaven), et il est bien possible que ça s’avère être un passage déterminant entre ceux qui arriveront à passer correctement et les autres. Je dois réfléchir dans le bon sens et d’ici là choisir le bon timing pour un nouveau virement de bord que je dois faire sur la bordure de l’anticyclone avant de repartir en bâbord amures ». Chaque chose en son temps !
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